1969 : premiers pas sur la Lune
2009 : 40 ans après, une équipe de chercheurs de l’Université Paul-Cezanne étudie 14 grammes d’échantillons lunaires
Neil Arsmtrong et Buzz Aldrin ont recueilli 21 kilos de roches en 1969 lors de leur premiers pas sur la Lune. Grâce aux six missions Apollo, entre 1969 et 1972, ce sont 382 kilos d’échantillons de roches lunaires qui ont été ramenés sur Terre. Aujourd’hui encore ce matériel scientifique unique continue à être étudié…
L’équipe de Géophysique et Plantéologie du CEREGE (CNRS / Université d’Aix-Marseille), dirigée par Pierre Rochette (professeur à l’Unviersité Paul Cézanne) étudie – 40 ans après qu’Apollo 11 ait conduit des humains sur la Lune – 4 échantillons de roches recueillies sur la Lune par les missions Apollo. Les scientifiques du CEREGE ont fait subir aux roches lunaires -placées dans un champ magnétique contrôlé- des chocs induits par impulsion laser, puis ils analysent l’aimantation ainsi acquise par ces roches. Ils espèrent prouver que le champ magnétique lunaire peut avoir pour origine des impacts d’astéroïdes.
Jérôme Gattacceca chercheur au CNRS travaille actuellement sur ces 14 grammes de Lune… Interview.
1. Quels ont été les multiples voyages des échantillons sur lesquels vous travaillez ?
Il s’agit d’échantillons de roches volcaniques lunaires qui ont été ramassés sur la surface lunaire par les astronautes des missions Apollo 14, 15, et 17. Comme toutes les roches ramenées par les missions Apollo, celles-ci avaient été au préalable extraites de la croûte lunaire par des impacts.
2. Quels sont les objectifs de ces études ?
Il s’agit de comprendre l’origine des aimantations des roches lunaires. En effet, les satellites en orbite autour de la Lune ont détectés des champs magnétiques autour de notre satellite, et les échantillons rapportés par les missions Apollo sont également aimantés. Pour l’instant on ne sait pas expliquer pourquoi. Nous souhaitons vérifier une des hypothèses qui voudrait que cette aimantation soit créée par les impacts d’astéroïdes qui forment les grands cratères visibles à la surface de la Lune. Pour cela nous avons reproduit à petite échelle ces impacts d’astéroïde en utilisant des lasers de puissance dans un laboratoire de Poitiers. Ces lasers ont une puissance équivalente à celle d’une centrale nucléaire, mais pendant un temps très bref (quelques milliardièmes de seconde).
Au final comprendre l’origine des champs magnétiques lunaires c’est comprendre le fonctionnement de l’intérieur de notre satellite, en particulier la possibilité que la Lune ait eu par le passé un noyau de fer-nickel métallique partiellement liquide comme c’est le cas actuellement pour la Terre.
3. Avec des bouts de Lune entre les mains vous avez dû travailler la tête dans les étoiles ? Quels sont les effets provoqués par ce « graal » sur un jeune chercheur ?
Tenir un morceau de Lune dans ses doigts est une émotion forte, peut-être encore plus pour un géologue ! Plus que l’origine lunaire de ces échantillons, c’est leur côté historique qui y fait beaucoup. L’émotion n’est pas du tout la même quand nous travaillons sur les météorites en provenance de la Lune. Les échantillons Apollo ont cette magie supplémentaire associée à toutes les images de cette fabuleuse épopée spatiale.
Sur le plan professionnel travailler sur les échantillons Apollo est l’aboutissement d’années de préparation de ce projet et la promesse de résultats scientifiquement intéressants. Et lors des expériences délicates de choc, il faut réussir à faire abstraction de la nature exceptionnelle de ces échantillons pour garder la concentration nécessaire. Pas question d’endommager ces petits bouts de Lune !
4. Quand aurez-vous des résultats ? Qu’attendez-vous exactement ?
Le dépouillement des premiers résultats montrent que nous avons réussi à aimanter les roches lunaires en reproduisant à petites échelles les impacts d’astéroïdes. Il reste un travail relativement long à effectuer pour vérifier si ce type d’aimantation peut suffire à expliquer ce qui a été observé sur la Lune et sur les échantillons Apollo. Ensuite viendra le tour des modélisateurs qui essaieront d’expliquer à partir de ces données les cartes de champ magnétique dressées par les satellites en orbite autour de la Lune.
5. Une fois les études terminées où iront ces échantillons ? Sur votre table de nuit ?
Certainement pas ! La NASA nous impose un plan de sécurité assez draconien et tous les échantillons rejoignent leur coffre-fort à Houston à la fin du projet de recherche. Mais il faut reconnaître que la NASA prête volontiers ces échantillons qui sont considérés comme un patrimoine de l’humanité entière (la Lune n’appartient à personne !) même si ce sont les américains qui en assurent la gestion.
Propos recueillis auprès du service communication de l’Université Paul-Cézanne (Aix-Marseille III)