J’ai retrouvé Matthieu Soudet lors du Festival de Montier. En réalité, c’est lui qui est venu me voir. Nous nous étions rencontrés il y a quelques mois lors de la remise en liberté d’un phoque soigné dans un centre spécialisé (C.H.E.N.E – 76). C’était juste après la cérémonie de remise des prix, et il tenait fièrement trois beaux livres dans ses mains. J’ai vite su que c’était la récompense pour avoir remporté un prix d’importance dans les catégories jeunes. Je lui ai posé quelques questions auxquelles il a répondu avec gentillesse, simplicité et sensibilité.
LeJournalNature – Quand as tu découvert la photo de nature et qu’est-ce qui t’a séduit dans cette pratique ?
Matthieu Soudet – Aussi loin que remontent mes souvenirs j’ai toujours été passioné par la nature, mais c’est vers l’âge de 10 ans que le besoin d’immortaliser ces rencontres avec le monde sauvage se fît sentir. A ce moment, la photographie s’est naturellement imposée à moi comme le meilleur moyen de capturer ces instants furtifs et les émotions qui s’en dégageaient.
LJN – Que intérêt éveille en toi la photo de nature ?
MS – Mon intérêt pour la photo de nature est, je pense, le résultat d’une simple alchimie entre ma passion pour les arts et mon amour de la nature. Les sensations que peut procurer la photographie animalière sont vraiment uniques. Il m’est arrivé de voir des chevreuils accompagnés de leurs petits s’approcher de moi à quelques mètres seulement, de voir des oiseaux se poser sur ma tête lorsque j’étais sous une toile de camouflage, observer de près des animaux très craintifs… ce sont des moments extrèmement forts, que j’essaie de partager avec le plus grand nombre au travers de mes images qui, je l’espère, participent à leur niveau à la sensibilisation à la nature.
LJN – Où et comment pratiques-tu ?
MS – La photographie animalière est ce qui me demande le plus de temps et de patience. Il faut savoir que derrière chacune des photographies d’animaux sauvages il y a des heures de travail. Il faut d’abord repérer le terrain, apprendre à connaître l’animal, ses habitudes, parfois préparer des affûts et y rester posté des heures durant, souvent sans résultats. L’échec est monnaie courante, ça fait partie du « jeu » mais il ne faut pas se décourager… Quand on a « la bonne photo », celle qu’on rêvait de faire depuis des mois, la joie est telle qu’on oublie toutes les difficultés. J’habite au centre du Pays de Caux, en Seine-Maritime. Mes terrains de prédilection : les bois autour de chez moi pour les mammifères, mon jardin pour les oiseaux (notamment l’hiver, où je les nourris), et j’adore faire de la photo de paysage sur le littoral !
LJN – Avais tu participé à d’autres concours et expos avant Montier ?
MS – J’avais seulement participé au concours Festimages nature, où j’ai gagné le grand prix jeune.
LJN – Qu’est-ce qui t’a amené à concourir à Montier ? N’avais tu pas un peu d’appréhension pour un concours de cette dimension ?
MS – Evidemment quand un jeune s’attaque à un grand concours comme celui de Montier, c’est souvent sans grande conviction, surtout par curiosité, avec peu d’espoir de remporter un prix. Mais j’ai tout de même tenté l’expérience pour voir ce que valaient mes photos, pour les mesurer à celles d’autres concurrents de mon âge.
LJN – Que cela fait-il quand on apprend qu’on a gagné ?
MS – Quand j’ai reçu la lettre j’étais d’abord très surpris, puis bien sûr très heureux ! Voir une de mes photos primée dans un concours comme celui-ci, c’était un rêve ! Savoir qu’un jury de professionnels a choisi ma photo parmis toutes les autres, c’est très encourageant.
LJN – Quel matériel utilises-tu ?
MS – Je suis chez Canon depuis que j’ai commencé la photographie ! Actuellement j’ai un EOS 20D couplé à un Sigma 50-500mm. Pour les autres objectifs, mon père et moi nous nous les partageons.
LJN – Quels sont tes projets (études, photo) ?
MS – Pour les études j’avoue que je ne sais pas encore du tout où me diriger. J’aimerai devenir photographe animalier mais c’est un métier où il faut vraiment lutter pour y faire sa place et réussir à en vivre. Mes projets à court terme sont la vente de tirages et, pourquoi pas, la préparation d’une exposition.
LJN – Comment tes parents voient-ils ta passion pour la photo ?
MS – Mes parents nous on toujours encouragés, mon frère et moi, à faire ce que l’on aimait faire. Par conséquent ils me soutiennent, sans me pousser, et je les en remercie car sans eux je n’en serais pas là aujourd’hui.

LJN – Quel prix as-tu remporté; qui t’a remis ta récompense ?
MS – J’ai remporté le prix « Monde Végétal » dans la catégorie 12-15 ans. J’ai aujourd’hui 16 ans, mais j’en avais encore 15 au moment des envois et j’ai gagné trois très bons livres de photographes animaliers. Sur l’estrade, j’étais très nerveux et excité (j’ai d’ailleurs lourdement trébuché), à tel point que je n’ai pas bien compris qui était cet homme sympathique qui m’a remis la récompense.
LJN – Quel est le photographe que tu admires le plus, et pourquoi ?
MS – Vincent Munier ! C’est un photographe incroyable, qui est en train de porter très haut la bannière des photographes animaliers ! Toutes ses photos ont une âme, elles me transportent. J’ai eu l’occasion de le rencontrer au festival de Montier-en-Der, et c’est un homme calme et extrèmement intéressant. Il est considéré comme l’un des plus grands photographe animalier au monde mais a su rester très simple et accessible. De plus, estimant qu’il a eu sa part de gloire, il ne participe plus aux concours, et cela fait de lui un « très grand » parmi les « grands » !
Après ces quelques échanges, je suis allé voir la galerie de photos de Matthieu, ainsi que son blog. J’en suis resté stupéfait. Quand on est jeune, on se cherche, on court après son style. Matthieu nous montre un grande diversité de sujets. Certaines images peuvent rivaliser avec celles de photographes de renom. Ce sont des photos d’expo, de livres d’art, de concours. Je suis persuadé que le prix remporté lors de ce 12è Festival de l’image animalière et de nature n’est que le premier d’une (très) longue série et que Matthieu sera un jour parmi les grands qu’il admire aujourd’hui.
Interview par Pierre Demeure
Vous pouvez voir la galerie photo de Matthieu Soudet : http://www.flickr.com/photos/matthieus
Son blog : http://matthieu.soudet.over-blog.com/